On n’arrête plus la tornade Ladesou ! Après avoir provoqué un cataclysme la saison dernière aux Variétés, elle revient dans Nelson, la seconde pièce du jeune auteur Jean Robert-Charrier. Après Amanda Lear dans Divina, le directeur de la Porte Saint-Martin compose un boulevard sur mesure pour une autre blonde hilarante. Cette comédie carnassière et méchamment drôle s’inscrit dans l’air du temps : vacharde avec les écolos-bobos et les bourgeois capitalistes, Nelson assume ses clichés et provoque une tempête générale de rire. Locomotive humoristique ultra efficace, casting de luxe, magnifiques costumes, décors imposants et rythme à cent à l’heure. Bref, du bonheur ! Un de nos coups de cœur de la rentrée niveau comédies.
N’importunez pas Jacqueline ! Cette célèbre avocate, vénale, carnivore et castratrice vit sur les chapeaux de roue. Menant tambour battant son existence trépidante de working-girl, notre amatrice de fourrure doit relever un défi de taille. À la demande de sa fille Christine, étudiante en sociologie férue d’humanitaire, Jacqueline se voit forcée de travestir ses principes bourgeois pour endosser le costume d’une alter-mondialiste végétalienne et tolérante. Dans le seul but d’aider son enfant à tenter de partir en mission en Afrique. S’ensuivra un dîner de cons d’anthologie où le naturel reviendra vite au galop… Quiproquos et gaffes en pagaille ! Avec un lapin aveugle en prime pour faire pleurer dans les chaumières.
Inutile de le cacher plus longtemps : Nelson nous a littéralement emportés. On pressentait déjà qu’avec Divina, Jean Robert-Charrier tracerait son chemin dans les sentiers sinueux du boulevard. Impression confirmée avec cette nouvelle mouture confrontant le snobisme de la classe supérieure et l’écologisme un brin radical des bobos parisiens. L’auteur n’hésite pas à enfoncer des portes ouvertes et à s’engouffrer dans des brèches caricaturales, dans la veine traditionnelle des boulevards. Ce repas abracadabrantesque fonctionne pourtant à plein régime : l’antagonisme des deux familles, finalement pas si différentes, fait mouche car porté par une écriture alerte et une direction d’acteurs précise et démente.
Chantal Ladesou apparaît évidemment comme LA caution comique du spectacle. Conçue entièrement pour elle, la pièce exacerbe les talents d’humoriste de cette cougar irrésistible. Sa voix rocailleuse d’harpie-sorcière blasée suffit à déclencher les zygomatiques tout comme son insolence et sa franchise sans limite. Idéale en avocate cynique et survoltée, Chantal Ladesou fait le show comme personne. À ses côtés, Armelle ne demeure pas en reste : sa diction impayable combinée à ses airs aristocratique ne rendent que plus impayable ses torrents d’insulte en mode Gilles de la Tourette, suite à l’indigestion malencontreuse de pâtes à base d’œuf… Sans oublier Thierry Samatier, en époux à l’ouest et chanteur raté, Éric Laugérias en mari écolo lubrique et Simon Jeannin en fils stupéfiant dans sa danse vaudou.
Les costumes fleuris de Michal Dussarat apportent une délicate touche kitsch et décalée et les décors monumentaux et chic de Stéphanie Jarre créent une ambiance cosy de bon aloi. La mise en scène de Jean-Pierre Dravel et Olivier Macé se veut minutieuse et pointilliste, chaque détail se trouvant à sa place. Malgré quelques légères baisses de régime, l’ensemble s’avère tout à fait captivant et la machine comique tourne avec une belle dynamique.
Nelson s’érige ainsi comme l’une des comédies incontournables en cette rentrée théâtrale. Emportée par la géniale Chantal Ladesou, la pièce de Jean Robert-Charrier assure sa mission de divertissement avec brio et offre une détente incomparable. Si vous voulez vous relaxer avec un boulevard délicieux, vous savez ce qu’il vous reste à faire ! ♥ ♥ ♥ ♥